Idées sur l’origine de l’homme en France de 1800 à 1871 entre Lamarck et Darwin

Résumé. — La date de 1871 est retenue à juste titre par les historiens des sciences comme une date importante dans l'histoire des idées. C'est en effet cette année que Darwin fit paraître The Descent of Man. On a pensé pendant longtemps, et on continue à le faire, que les idées darwiniennes sur la transformation des espèces étaient apparues comme un coup de tonnerre dans un ciel serein (Montalenti, in Groeben). Jusque-là, les savants suivaient les yeux fermés la vision imposée par la théologie orthodoxe. Lamarck avait déjà soutenu dès le début du XIXe siècle un transformisme généralisé, c'est-à-dire incluant l'origine animale de l'Homme. Cuvier, bien entendu, niait cette descendance, et, pour mieux y mettre obstacle, refusait de reconnaître l'existence de l'homme fossile. Malgré sa résistance et celle de ses disciples, la présence des restes humains contemporains d'animaux disparus va être progressivement acceptée par les géologues et les paléontologistes durant la première moitié du XIXe siècle. Tournai, de Christol, Marcel de Serres, Ami Boue, dans les années 1840, n'éprouvaient plus de doute sur l'existence de l'homme fossile, et Alexandre Brongniart lui-même avouait que « les restes humains approchaient d'être un fait patent ». Parallèlement à cette avancée dans la reconnaissance de l'ancienneté de l'homme, l'idée de son origine animale continuait à se répandre. Les idées lamarckiennes sur ce point avaient trouvé un écho favorable auprès d'autres savants, tels que Delamétherie, Virey, Etienne Geoffroy Saint-Hilaire. Elles se répandent avec une telle force dans la société qu'elles envahissent les milieux chrétiens, et même ecclésiastiques. Les accents passionnés des défenseurs de l'orthodoxie ne laissent aucune illusion sur cette pénétration : bien loin que ce fut la théologie qui occultât la science, il apparaît, si l'on en croit la dénonciation passionnée de l'abbé Maupied, le collaborateur du grand paléontologiste de Blainville, que ce sont les idées transformistes qui pénétraient même la « théologie scolastique ».

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